2021 – Mémoire

Dans le cadre de mon diplôme en DSAA Design Produit, j’ai mené une recherche expérimentale autour de la création d’un matériau à partir de cendres domestiques.
Ce mémoire, intitulé Expérience Matérielle, interroge la place du designer dans la conception de matériaux, et plus spécifiquement les méthodes d’expérimentation comme outil de création.

En tant que designer, je suis animée par une curiosité profonde pour les matières brutes, les gestes de transformation, et les formes que l’on peut en tirer. Mon mémoire, intitulé Expérience Matérielle, s’inscrit dans cette recherche. Il explore comment, à partir d’une matière rejetée — la cendre domestique —, il est possible de créer un matériau exploitable par l’expérimentation. La cendre, résidu banal de la combustion, est instable, poudreuse, souvent perçue comme sale ou inutile. Pourtant, elle possède des qualités sensibles, esthétiques et symboliques fortes. Elle évoque le foyer, le feu, la mémoire… mais aussi la disparition, le déchet. En choisissant de travailler avec cette matière, j’ai voulu inverser son statut : lui donner forme, fonction, et valeur.

Le mémoire questionne le rôle du designer dans la création de matériau. Peut-il, sans être ingénieur, développer des matériaux par l’expérimentation ? Quelles méthodes, quels outils, quelles postures adopter lorsqu’on travaille avec une matière instable ? Mon approche s’est appuyée sur une méthode intuitive, artisanale et rigoureuse à la fois : observer, tester, documenter, recommencer. J’ai exploré différents protocoles, joué sur les liants, les formats, les textures, pour obtenir une diversité de résultats : encres, plaques, tuiles, motifs en relief…

 « C’est par l’expérimentation, que le designer acquiert la capacité de faire des choix de possibles, riches et pertinents. Cependant, il s’agit d’un processus intériorisé, c’est-à-dire qui semble être intégré dans la pratique sans que le designer en soit conscient. Cet aspect démontre l’importance du
« temps du faire » et du caractère indispensable du contact avec la matière, pour pouvoir cerner complètement les qualités et enjeux qu’elle soulève. »

Plus largement, ce mémoire interroge le design matériau comme pratique à part entière. Il propose un regard critique sur nos façons de produire, d’utiliser les ressources, et de concevoir. Il défend une vision du design qui valorise les matières oubliées, les savoir-faire manuels, et les modes de production à échelle humaine. Un design qui ne cherche pas la perfection industrielle, mais accepte l’imperfection, la variation, et le sensible.

Ce travail marque une étape dans ma démarche personnelle : celle d’un design ancré dans la matière, engagé dans sa transformation, et ouvert à de nouvelles formes de narration et de production. En choisissant une matière rejetée, souvent considérée comme un simple résidu – la cendre – j’ai cherché à révéler son potentiel esthétique, sensoriel et technique. Ma démarche s’inscrit dans une approche artisanale et responsable, où la matière informe devient matériau par le geste, le test, la variation et l’adaptation.